Bonjour à toutes et à tous, vous êtes sur Cause Commune. Bienvenue dans ce 60e épisode de Ainsi va la ville, l'émission dédiée aux pratiques urbaines contemporaines et aux réflexions autour de la fabrique de la ville. Le numéro d'aujourd'hui est soutenu par la Société des grands projets que nous remercions. Je suis Paul Citron, urbaniste, coproducteur de l'émission avec Dominique Alba, architecte et urbaniste. Bonjour Dominique. Bonjour Paul. Alors aujourd'hui, nous allons aborder le thème de l'habitat non ordinaire avec nos invités Camille Picard et Gaspar Lyon. Camille Picard, bonjour. Bonjour. Vous êtes politiste, urbaniste, vous avez longtemps travaillé dans l'immobilier pour le groupe Caisse des dépôts et vous dirigez désormais Toit Temporaire Urbain, une entreprise de construction modulable sur des fonciers vacants que vous avez fondé pour la Caisse des dépôts avec SNCF Immobilier. Gaspar Lyon, bonjour. Bonjour. Vous êtes sociologue, maître de conférences à l'université Sorbonne-Paris Nord. Vos travaux portent sur les classes populaires et les formes de logements dégradés non ordinaires. Alors pour vous mettre en appétit, nous allons lire un petit extrait de l'ouvrage rédigé par Gaspar Lyon qui s'appelle Vivre au camping, un mal logement des classes populaires. Au-delà de la diversité des formes et des qualités des habitats, des trajectoires, des positions et des expériences, l'enquête menée par Gaspar montre comment les habitants, ces habitants sont classés dans une position dérogatoire au droit commun locatif et privé des différentes dispositions juridiques qui assurent aux locataires protection de leur jouissance de logement. Nul encadrement de la durée du bail, nulle réglementation des hausses déloyées en cours de bail, nulle allocation, nulle prêt, nulle aide. Et si l'on peut parler de précarité au sujet de ces habitats non ordinaires, c'est ainsi moins en raison de leur inconfort ou de leur insalubrité. Un certain nombre de ces habitats disposent de tous les équipements d'un logement standardisé, des équipements résidentiels vécus qui peuvent s'avérer très positifs ou encore de la pauvreté de leurs habitants. Certains sont loin d'être démunis économiquement que de l'insécurité des statuts d'occupation. Une insécurité statutaire qui ne préjuge néanmoins en rien, on l'a vu, de la durabilité effective de ces installations, puisqu'elles sont en moyenne beaucoup plus pérennes que d'autres formes d'habitat comme les billes aux villes contemporains ou les squats. Ce texte est extrait de Vivre au camping paru en 2024 au Seuil. Et ça nous amène à la première série de questions. De quoi parle-t-on quand on parle d'hébergement et de logement non ordinaire ? Voyez, vous nous en parlez un peu plus. Donc peut-être d'abord, Gaspar Lyon, en regard de votre expérience, quels sont les chiffres du camping ? Qu'est-ce que ça veut dire, ce Vivre au camping ? Qu'est-ce que vous avez analysé dans votre enquête, je dirais, très riche ? Et je crois que vous avez vous-même habité dans le camping pour pouvoir répondre au mieux. La catégorie d'habitat non ordinaire, c'est une catégorie que j'ai, comment dire, que j'aborde en tant qu'elle désigne deux éléments, je dirais, principaux, à savoir d'une part le fait que ce sont des formes de logement ou des habitats qui dérogent aux formes traditionnelles sur un plan notamment technique, architectural, etc. Mais aussi sur la base du fait que ce sont des lieux, et vous l'avez cité dans le passage que vous avez lu, des lieux qui en fait dérogent le droit commun locatif. Donc c'est des lieux, des habitats qui sont faiblement ou très peu protecteurs pour les personnes qui les occupent. Et donc c'est le cas, en réalité, de tout un tas de situations qui se sont développées depuis les années 2000, enfin qui existaient depuis très longtemps, mais on assiste à une recrudescence dans un contexte d'envolée des prix du logement, de ces formes d'habitat peu régulées, peu encadrées, aux statuts d'occupation faiblement protecteurs. Et c'est le cas notamment du camping résidentiel, ce qu'on peut appeler le camping résidentiel, à savoir la situation de personnes qui habitent à l'année dans des caravanes ou dans des mobilhommes, dans des campings, des campings traditionnels construits à la base pour le tourisme, pour les loisirs et qui ont été détournés à des fonctions, à des fins résidentielles. Alors quand on s'imagine justement ces campings touristiques, on se les imagine dans des zones extrêmement touristiques, je ne sais pas, des bords de mer, mais en réalité, il y en a également, et c'est ce que vous montrez dans votre enquête, dans les agglomérations. Est-ce que peut-être vous pourriez nous dire où sont les campings que vous avez étudiés ? Comment, où est-ce qu'ils se situent dans la ville ? Et comment ils s'organisent à l'intérieur, leur taille, les types d'habitants qui, enfin, déjà leur taille ?